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Saint Michel de Braspart

 

 

Saint Michel de Braspart dans le brouillard

L’Ankou

Je m’étais mis dans l’esprit d’aller faire un tour à Saint Michel de Braspart depuis quelques jours déjà. J’avais choisi ce jeudi, car ce jour là, je n’avais rien de prévu. En me réveillant aux sons des infos distillés par la radio, je fus ravi d’apprendre que la météo prévoyait une journée radieuse. Je partais vers les neuf heures. Le ciel était couleur laitage ouatée, et la fraîcheur de la nuit engourdissait encore les lieux. Il me fallait une demi-heure en voiture pour rejoindre le point culminant de la Bretagne. Plus je me rapprochais, et plus le brouillard était présent et dense. Arrivé près de l’antenne radio, je ne distinguais plus rien au dessus d’une hauteur de vingt mètres, pas plus que la pointe de l‘antenne. La journée commençait bien pour faire une journée d’excursion et de safari photo. J’arrivais au croisement. À ma droite, la route redescendait pour aller vers Morlaix, tout droit elle descendait vers Landivisiau à ma gauche, elle suivait la ligne de crêt jusqu’au mont Saint Michel de Braspart. De là où je me trouvait, le paysage était magnifique. J’observais tout le pays du Léon qui s’étendait jusqu’à la mer. Le brouillard, apparemment, avait décidé de résider aujourd’hui en altitude, et de partager son temps avec moi. Après une bonne dizaine de minute sur cette petite route sinueuse, bordée par un profond fossé peu accueillant, entouré d’un paysage digne d’halloween, noyé dans un brouillard voletant sous un petit vent fripon, j’arrivais devant le panneau m’indiquant la petite route qui monterait jusqu’au sommet du mont Saint Michel. J’avais eu peur de mettre trompé de chemin. D’ordinaire, on distingue très bien, de loin, la silhouette de la chapelle posée sur les rondeurs du mont. Mais aujourd’hui, je n’avais pour seul repère que la largeur de la route, et quelques paysages fantomatiques. Je me dirigeais sur ce petit chemin étroit qui vous amène presque au sommet. Arrivé en haut, je me garais sur le petit parking. J’hésitais, je me disais qu’il serait aussi bon de rentrer, dans ce brouillard à couper au couteau, je ne verrais rien de ce que j’étais venu y faire. Enfin, je décidais de rester. Je n’étais pas venu jusque là pour renoncer. Je sortais sur cette esplanade déserte. J’étais le seul à oser sortir par un temps pareil. En haut de moi, j’apercevais le petit sentier pédestre qui vous conduit jusqu’au sommet, je le voyais se perdre et disparaître dans la brume, en dessous de moi, au bord de cette esplanade, j’apercevais cette lande se dessiner à travers le brouillard. Avez-vous déjà vu des tempêtes de neige, c’est impressionnant. Là, c’était une tempête de brouillard. Le vent laminait et balayait le brouillard en lamelle compacte et drue. Le brouillard, telle une fumée opaline et blanchâtre, ou telles des spectres entraînés dans des danses endiablées, tournoyaient dans le ciel. Le vent glacial venait de l’est. De face, il me piquait les yeux, alors je décidais de lui tourner le dos. Cela tombait bien, car j’avais décidé d’aller à l’ouest, explorer un amoncellement de gigantesques pierres. Je fermais mon blouson jusqu’au menton, et m’enroulais les oreilles d’un foulard, car Le vent vrombissait autour, à les en faire frémir. J’avais pris avec moi mon portable, au cas où, une paire de jumelle, et un appareil photo. Je me disais que le temps allait bien finir par se lever, et le soleil apparaîtrait enfin. Je redescendais donc à pied, côté ouest. La route qui m’avais amenée jusque là était à l’est. Le chemin que je devais prendre avait dû être modelé par des écoulements d’eau de pluie. Une profonde ornière balafrait le flanc de ce mont jusqu’à ces pieds. Le ciel se levait alors, dégageant l’horizon. J’observais alors le but de mon voyage à la jumelle. Ces pierres de schiste gris noir, dressées en désordre, jurent dans ce décor de landes envahi de genets, de bruyères en fleurs, d’ajoncs, de fougères, et où se dissimulent quelques tourbières dangereuses. On prétend que quelques voyageurs peu vigilants se sont laissés piéger, et ont disparu dans ces sols meubles comme des sables mouvants. D’autres seraient morts, asphyxiés par les émanations toxiques, provenant de gaz issu de la décomposition organique de ces tourbières. Aujourd’hui, la journée est idéale, si le soleil daigne pointer ses chauds rayons vers le pays. Le sol est sec, même s’il faut rester vigilant, et la nature accueillante. J’étais venu ici l’année dernière, au mois d’août. La nature exaltait toute sa vigueur, et les genets ses piquants. On ne pouvait pas voir où l’on posait ses pieds. La végétation dense s’entremêlait dans de multiples nœuds inextricables. Même si rien ne pousse au dessus des trente centimètres, sur des kilomètres à la ronde, à part quelques vieux arbres solitaires, la flore récupère en densité ce qu’elle a perdue en hauteur. D’autant plus qu’elle pousse par endroit sur des lits de mousses épais, qui vous laisse une très mauvaise impression, lorsque l’on marche dessus. Aujourd’hui, je vais me risquer à essayer d’atteindre ce fort de pierre perdu dans la lande sans aucune route pour y accéder. La descente du mont est relativement aisée, et bon nombre de randonneurs l’empruntent. Ce lit de rivière est inégal et jonchés de pierres blanches. Quand je me retourne, et que j’observe le flanc du mont Saint Michel, j’ai l’impression que des tonnes de pierres ont été déversées de son sommet. Ce n’est pas une montagne ordinaire, lisse et recouverte de végétation, mais une montagne de gravats éparse, ou ne pousse que quelques mousses. L’impression que j’en ai, bien que je ne sois pas géologue, c’est qu’un édifice de pierre blanche était autrefois érigé au sommet de ce mont avant que l’on y bâtisse l’église. Cette idée me vient du fait, que tous les pics des monts d’Arrée sont en schiste gris noir. Là, ce sont des gravats de pierre d’une blancheur translucide. Cette impression est assez étrange, car la blancheur de ces pierres laisseraient supposer qu’elles ont été extraites il n’y a pas si longtemps. En ville, les édifices en pierres blanches doivent être ravalées toutes les décennies. Elles noircissent vite. Il est vrai qu’ici, il n’y a aucune pollution. En haut du mont, partout où l’on regarde, on ne voit aucune ville, aucune usine, rien, que de la lande jusqu’à perte d’horizon. La descente dure quelques minutes, il faut regarder où l‘on met les pieds. Les personnes qui ont des problèmes d’équilibre s’abstenir. Un chemin horizontal, mais toujours caillouteux, se dessine maintenant dans la lande sur quelques centaines de mètres. Rien que des pierres blanches qui s’effritent au fil du chemin pour finir en poussière plus ou moins fine. Il faut en permanence regarder où l’on pose son pied, de peur de se tordre la cheville sur un caillou bancal. Sur ma droite, un muret de pierre blanche, envahi de ronces, à demi écroulé, protège probablement une parcelle d’un particulier. La dernière fois que j’étais venu là, j’étais passé sans m’arrêter. Aujourd’hui, j’ai voulu pénétrer dans ce jardin où quelques vieux arbres tombent leurs lourdes branches de lassitudes vers le bas. Cet espace est très réduit, et je n’ai pas voulu explorer plus loin. Je suis rentré, car à cet endroit, le muret est effondré. Aucun pas plus haut que l’autre n’est nécessaire pour pénétrer dans ce jardin. Bien qu’il ne paraisse pas bien grand, ce jardin me parait assez dense dans son centre. Et je n’en vois point ces limites. Devant moi, posée au sol, une énorme pierre plate ronde, creusée en son centre comme un récipient, un réceptacle. Cela ressemble à une énorme assiette creuse posée sur une table compacte. J’ai l’impression que l’on s’en est servit pour y allumer un feu. Il y reste encore des cendres, preuve que l’on s’en est servi récemment. Tout autour, en rond, d’autres pierres trônent comme des sièges offerts aux invités de cette réunion. L’endroit est étrange. Une fête rituel s‘y est-elle donnée ? Une soirée à la belle étoile pour touristes imaginatifs ? Ces pierres de schiste sont trop lourdes pour avoir été transportées par deux ou trois personnes seulement, et elles donnent l’impression d’avoir été travaillées pour avoir ces formes presque parfaites. Dans ce verger qui préserve bien ses secrets, je ne m’attarde pas. Un pinson égraine une interminable litanie coupée de longs silences. C’est endroit est assez anxiogène. Je ne saurais dire pourquoi. La végétation, trop compacte peut-être, peut donner cette impression de claustrophobie. C’est le seul endroit, à des kilomètres à la ronde, où la végétation est si concentrée.

La lande protège ce lieu

Je continue le chemin qui se termine à une intersection. Là, un chemin sinueux se dessine. Je dis chemin, bien que je pense que c’est dame nature qui a dessinée ce lacet qui serpente autour du mont Saint Michel. Les eaux de pluie ont façonné, en profondeur, et de façon inégale, cette cicatrice qui parcourt la lande. Des galets de pierres blanches jonchent le sol. Cela ne m’arrange guère, car aucun des deux côtés du chemin ne s’approche un tant soi peu du lieu que j’ai décidé de visiter. J’avais choisi de visiter cet endroit car cet amoncellement de pierres de schiste gris noir de tailles gigantesques, dans un désordre invraisemblable, m’avais inspiré. J’avais regardé sur Google Earth, une image satellite des lieux. Cela me faisait penser à un lieu dédié aux dieux de la terre et de la fertilité.

Derrière ces falaises une vallée se découvre

À l’est du mont Saint Michel, à peine à un kilomètre, on distingue quelques traces laissées au sol, laissées par d‘anciens bâtiments, probablement construit en bois. On devait y vénérer le printemps, la Lune, la féminité, la fertilité, la nature, le bois, symbole de la Lune, la naissance, le solstice d‘hiver, où plus exactement non pas le 21 Décembre, mais le 25 Décembre, date où le soleil remonte à l‘horizon et annonce le renouveau de la nature. À l’ouest du mont Saint Michel, ce dresse ce sanctuaire de pierre, où l’on devait y vénérer les esprits, l’éternité, l’hiver, la mort, le Soleil. Pour les anciens, la Lune était le symbole de la féminité, de la vie et de la mort, dans d’éternelles courses cycliques, alors que le Soleil était le symbole mâle, de l’esprit éternel. Le mont Saint Michel, ou Menez Kronan, que l’on peut assimiler aux dieux de la terre et de ses richesses comme Taranis, dieu céleste, dieu des morts, du tonnerre, du soleil, et Cernunnos dieu cerf, dieu des morts et des vivants, du monde souterrain, de la nature. Ces dieux sont tous protoceltiques.

Ces falaises mesurent vingt mètres de haut

Lorsque l’on regarde le mont Saint Michel de Braspart, avec ses courbes arrondies et parfaites, on pense aussitôt à un ventre de femme enceinte. Je me retrouvais donc en bas du mont, au bord de ce chemin de fortune caillouteux, et je me devais prendre une décision. Oserais-je m ‘aventurer dans cette lande recouverte de genets épineux, de bruyères, de fougères en pousse. Je m’avançais lentement, pas à pas, en avant, en suivant la sente de quelques lapins. Je suivais également les traces d’écoulement d’eau de pluie qui avait laissé le sol sans végétation. J’avais toujours en point de mire les sommets de ces énormes pierres grises noires. Elles étaient à peine à mille mètres, mais fallait quand même y aller. Je respecte la nature, et je regardais où je posais le pied. Il était hors de question que je marche sur une fougère encore enroulées sur elle-même. Mais la nature savait également se faire respecter. Même si les genêts reprenaient de la vigueur après les longs mois d’hiver, ils pointaient, menaçant, déjà de redoutables épines. J’avançais hésitant, devais-je renoncer ? Finalement, en prenant mon temps, précautionneusement, j’avançais. Je voyais, ici où là, des trous béants de deux mètres de diamètre remplis d’une substance noire qui pourrait faire penser à du bitume. Les tourbières devaient être dangereuses si l’on tombait dedans. À cette époque de l’année, où la végétation n’est pas encore pleinement épanouie, on remarquait ces pièges. J’imagine qu’à la tombée du soir, des jours de brouillard, il n’est pas recommandé de parcourir la lande. Heureusement que le brouillard s’était levé maintenant. En avançant en direction de mon but, j’observais ici et là des monticules de pierres blanches. On aurait pu penser que c’était là l’œuvre d’une construction réfléchie. J’arrivais finalement près de ces énormes blocs de schistes gris noirs. La première idée qui vous vient à l’esprit quand t-on les voit, c’est le mot: Chaos. C’est impressionnant de voir tous ces blocs pointés dans un désordre invraisemblable vers le ciel. De là où je suis, à présent, j’aperçois la vallée en contre bas. Du haut du mont Saint Michel, en voyant ces blocs de pierres, j’imaginais qu’elle se trouvaient déjà dans la vallée, maintenant, je me voyais, de là où je me trouvais, en haut d’un mont. J’avançais prudemment, escaladant quelques blocs pour poursuivre mon chemin. J’appréhendais qu’il ne m’arrive un accident. Si je me cassais une cheville, j’aurais toutes les difficultés pour rentrer. Il ne fallait pas que je compte sur la venue d’un randonneur. Avec mes jumelles, j’observais au loin, sur le mont Saint Michel, quelques touristes visiter le site. Ils étaient aux nombres de trois. Ils y restaient quelques minutes avant de repartir. La fréquentation de ce site était parcimonieuse, même si, quand il faisait beau, ce qui était le cas à présent, la brume et le vent s’étant retirés, il y avait toujours un va-et-vient, mais il n‘y avait jamais plus de dix visiteurs en même temps. Il y avait également des adeptes du vélo qui osaient affronter ce mont.

Ces falaises donnent l'impression d'avoir été taillées

Je me disais que s’il m’arrivait quelque chose, je pourrais toujours agiter ma chemise comme étendard. J’avais également mon portable pour appeler des secours. Enfin! Ne provoquons pas le mauvais sort. Je resterais prudent, et renoncerais à m’aventurer là où résiderait le moindre danger. Le sol, à l’intérieur du sanctuaire, est inégal, et incliné. Une végétation hostile y pousse en totale liberté et anarchiquement. Je ne sais pas s’il y a des serpents dans ce décor caillouteux recouverts d’épineux. Je regarde ces blocs de pierre. Certaines mesurent quinze à vingt mètres de haut. Certaines de ces mégas pierres, aux teintes grises et noires, donnent l’impression d’avoir été taillées à angle droit et empilées. En fait, sans être géologue, je pense que ces blocs de pierres ont été brisés naturellement par le chaud et le froid et le mouvement de la terre. Certains blocs, de plusieurs tonnes, reposent en équilibre au dessus du vide, et au dessus de moi. Pourvu qu’ils ne décident pas de tomber précisément aujourd’hui, et à cette heure là. J’imagine que ce site à dû être utilisé autrefois de façon cultuelle. Il est tellement impressionnant. Il respire une conscience, une volonté, une destiné. Après avoir visité ce site, je décidais de rentrer. Sortis du site, une idée saugrenue m’est venue à l’esprit. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai voulu invoquer l’Ankou. Pour les armoricains, l’Ankou est le Charon grec, le nocher des enfers. Celui qui dans sa carriole brinquebalante ramasse les morts. Il n’est pas associé à la Faucheuse, la Mort, qui elle, prend la vie. Non ! L’Ankou est chargé de ramasser les morts. En général, c’est le dernier mort de l’année, qui est collé à cette corvée pour toute l’année suivante. Les légendes disent que l’Ankou habite la lande des monts d’Arrée quand il ne travaille pas. On dit aussi que lorsque l’on entend les roues d’une carriole résonner sur les pavés, dans le tintement de chaînes qui s’entrechoquent, la mort va frapper dans les environs. Je ne sais pas pourquoi j’ai voulu braver l’Ankou chez lui. J’étais seul au milieu de cette lande, je n’avais donc pas peur du ridicule d’être entendu. Ankou ! M’écriais-je quand même avec une certaine retenue. Ankou ! Répétais-je. Je sursautais quand j’entendis en écho, ce nom me résonner aux oreilles. Ankou ! Ankou ! Non ! Je n’avais pas peur, j’étais juste surpris. Ce n’était pas un écho qui me revenait, ce son avait été produit par un être vivant. Je reconnaissais aussitôt le chant d’un oiseau. C’était comme le chant du coucou, mais au lieu de dire coucou, cela faisait très distinctement « An! Cou, An! Cou» en deux syllabes bien distinctes. Je ne connais pas le nom de cet oiseau, mais c’était à n’en pas douter le chant d’un oiseau. Je me disais que pour les anciens, les oiseaux, principalement les oiseaux migrateurs, étaient considérés comme des psychopompes. Cela n’était pas le seul fait des armoricains, mais cette croyance était très largement répandue de part le monde. Les égyptiens avaient les sphinx, ainsi que les babyloniens et tous l’ensemble des pays du moyen-orient. Ainsi que pour les thraces, les phéniciens, les grecs. On les appelait les chérubins, les zéphyrs, les séraphins, les anges et autres. Tous ces êtres ailés veillaient sur les cimetières, et transportaient les âmes jusqu‘au pays des morts. Je venais de découvrir l’origine du mot Ankou. Cet oiseau devait se trouver là, où dans la matinée, je m’étais arrêté dans ce petit verger. Je crois que c’était des noisetiers. Le son venait de cet endroit, et aucun oiseau ne volait autour de moi. Je découvris à la sortie de ce sanctuaire un chemin bien tracé et rectiligne qui se dirigeait vers le mont Saint Michel. Ce chemin était bordé par un petit muret de pierres blanches dissimulé sous quelques plantes. La blancheur de ces pierres me laissait supposer qu’elles avaient été posées il n’y a pas si longtemps que cela. Non ! Cela ne voulait rien dire du tout, juste un préjugé que j’avais. Je me rappelais que j’avais déjà vu des tertres de pierres blanches entassées, comme pour des sépultures, sur la lande au Nord du mont Saint Michel. J’avais vu dans la matinée, non loin de là, des tertres de pierres blanches immaculées. Cela devait être la caractéristique de ce minerai. Il est vrai qu’ici, il n’y avait pas de pollution pour noircir les pierres. Quand même, une telle blancheur est surprenant. Quand ce muret avait-il été construit ? Il y a vingt ans, cent ans, mille ans ou plus. Ce muret était très bien battit, preuve qu’il avait été conçu avec soin. En constatant que certaines pierres étaient tombées, de ci de là, et que la nature s’était emparé et s’était développée sur ces ruines, prouvait que l’édifice n’était pas aussi jeune qu’il en avait l’air. J’avais également l’impression, qu’à l’origine, ce sentier avait été pavé. Il en restait des traces. J’arrivais rapidement vers le large chemin dégagé de toute végétation. Ce sentier discret, était séparé du chemin par l’empreinte d’une large tourbière asséchée. Je m’aventurais sur ce sol craquelé, mais sec. J’arrivais avec satisfaction sur le chemin caillouteux. Il m’est évident, à présent, que de ce côté-ci, je n’aurais jamais tenté de m’aventurer sur la lande. Cette tourbière, bien qu’asséchée, n’invitait pas à la ballade.

Saint Michel de Braspart vu du côté Ouest

 

Je décidais, pour finir mon parcours, de suivre ce chemin qui contournait le mont en direction du Sud. Je voulais voir la face Sud du mont Saint Michel. C’est sa face secrète. Toutes les photos touristiques, vous montrent le mont, soit du Nord, soit de l’Est. Je vais vous décrire le haut du mont Saint Michel. Le parking s’arrête à cent mètre du sommet sur son côté Sud. De là, on ne voit pas le flanc du mont, car la pente est trop raide. De plus, par sécurité, je pense, des poteaux électriques délimitent ce promontoire, que je pourrais considérer comme falaise, bien que la déclivité ne se fasse pas à angle droit. La pente est cependant ardue. Cette barrière électrique ressemble à celle que l’on pose aux bords des champs pour empêcher les vaches de partir. Un panneau vous renseigne sur le pourquoi de sa présence. Il vous y est expliqué qu’il s’agit d’une expérience, afin de préserver la flore et la faune des lieux. Il vous est recommandé de garder les chiens en laisse. Je pense que cette barrière est là pour empêcher les chiens de courir sur ce versant. Enfin, je dis cela, mais je ne pense pas qu’un animal, hormis un chamois, est l’envie d’escalader cette pente. Personnellement, je ne me suis pas approché du bord, et d’autre part, je n’ai pas essayé de vérifier si les fils métalliques qui s’enroulaient de poteau en poteau, sur tout le pourtour de cette esplanade, étaient ou non reliées au courrant.

Saint Michel de Braspart vu du côté Sud et entrée de l'hypogée

Deux chemins pédestres vous mènent au sommet, en formant un demi-cercle. Le premier, pourrait être considéré comme un escalier avec de hautes marches, chacune bordée par un rondin de bois: avis aux sportif. Le second suit le contour du mont dans un chemin large avec une pente acceptable. On part du Sud et on arrive au sommet à l’Est. Le sommet est relativement petit. C’est un faux plat circulaire avec une circonférence d’à peine cent mètre. On en fait le tour en moins d’une minute. La chapelle est minuscule, et se trouve au Nord du mont. Elle est orientée Est-ouest, comme toutes les églises, je suppose, et comme tous les dolmens. La nef est à l’est, le chœur à l’ouest. Le clocher vous indique donc l’ouest. Cette église est minuscule. Elle doit faire quinze mètres de long. Elle ne peut y accueillir qu’un vingtaine de personnes, et encore. Il n’y a aucun mobilier à l’intérieur, hormis une statue accroché au mur. Cette église semble avoir été construite dans une excavation du sol. La porte est au Sud, il n’y en a qu’une. Je pense que cette excavation empêche le vent de s’engouffrer dans l’église. L’édifice est bâti du côté Nord du sommet, posée à dix mètre du bord. Mais de ce côté ci, la pente est moins raide, et l’on peut voir jusqu’en bas. Le sommet n’est pas, comme le parking plus bas, délimité de barrière. Sur le flanc Nord-ouest, on constate des traînées de gravats de pierres blanches. Je ne sais pas ce qu’en pense les géologues. Moi, cela me fait penser au Parthénon, surtout à tous ces gravats qui jonchaient son flanc, après la destruction partielle du temple.

                                                                                Saint Michel de Braspart    Le lac de Brennilis au loin à l'Est

 

 Au centre du sommet du mont Saint Michel, qui forme un léger dôme, une dalle de béton de deux mètres de diamètre y a été coulée. Cela forme comme une petite tribune. C’est affreux. Je ne connais pas la signification, ni la fonction de cette dalle. On pourrait penser qu’elle recouvre un puit ou un trou. À moins que cette estrade est pour fonction de surélever les prêtres lors des fêtes religieuse. Cette dalle doit avoir cinquante ans au plus. Il est vrai que la petitesse de l’église y empêche d’y accueillir beaucoup de fidèles. Je pense que cette église est plus symbolique qu’autre chose. On la voit à des kilomètres à la ronde. De plus, je ne vois aucune ville, aucun village à perte de vue jusqu‘à l‘horizon. Je ne m’imagine pas, qu’avant l’invention de l’automobile, ce site, loin de tout, ait pu attirer chaque semaine son lot de croyants. Chaque ville, chaque village, chaque hameau possède son église ou sa chapelle. De plus, en général, le cimetière bordait l’église. Je pense que l’église chrétienne a voulu ici marquer sa présence, et occulter de vieilles croyances anciennes. On devait venir ici y célébrer les fêtes du solstices d’hiver marquant le renouveau, et les équinoxes. Sur le côté Sud-est du sommet, ce trouve une sorte de caisse délimitée par quatre rondins de bois. À l’intérieur, plein de petits cailloux blancs. Plus loin, sur ce sol dépourvu de végétation, ressort très bien des mots. Ils ont été formés avec ces petits cailloux. On peut y lire des prénoms, des signes d’amour, des marques d’affections. C’est un exercice ludique à faire en famille. Est-ce là des prières adressées aux dieux. On doit pouvoir les voir, et les lire à bord d’un petit avion. Ces mots, ont-ils été écrit par jeux, ou bien cela dénote t-il d’une volonté spirituelle. Toutes les personnes que j’ai vu visiter ce site, ont lu ces messages. Elles étaient toutes respectueuses. Je n’ai vu personne marcher dessus, ni retirer la moindre pierre. Je n’ai vu personne n’on plus se servir de celles du bac pour écrire quoi que ce soit. Voilà la description du sommet du mont Saint Michel de Braspart.

                                                                        Le côté Nord du mont Saint Michel de Braspart, une longue randonnée

 

Toutes les photos du site, que l’on trouvent sur le net ou sur cartes postales, prisent de loin, l’on été soit du Nord soit de l’Est. Au Nord du mont Saint Michel s’étire sur plusieurs kilomètres une suite de crête que les randonneurs empruntent. La végétation y est moins dense, à cause du vent qui râpe en permanence le sol. Les touristes, de là-bas, voient de très loin la silhouette de cette chapelle posée sur ce joli ventre rond. Cela fait de magnifiques photos souvenir. De même, lorsque l’on se trouve près du lac de Brennilis, à l’Est, on a une superbe vue sur le site. Lorsque l’on voit sur une photo, le clocher pointer à droite, on sait qu’elle a été prise côté Nord. C’est pourquoi on n’a pas de photo prise du Sud du mont, car du Sud, on ne voit pas l’église posée côté Nord du mont. Ce mont, sans église posée dessus, n’a aucun intérêt. Il n’y a aucune maison, aucun arbre, aucune jolie fleur, rien d’intéressant à photographier. Je dis cela, c’est pour vous inciter à lire dans le prochain article ma conclusion.

Une pointe surmontant la vallée

Le mont Saint Michel de Braspart n’est pas le seul mont des monts d’Arrée, mais c’est le dernier au Sud. Quand on vient du Sud, on tombe sur le mont Saint Michel au détour des derniers espaces boisés. Le flanc Sud n’attire pas l’attention, et on se dépêche de le contourner. La route qui passe à l’Est vous amène aussitôt dans le vif du sujet des monts d’Arrée. À l’Est de la route, on peut voir le lac de Brennilis, et à l’Ouest, la petite route qui vous conduit au sommet du mont. Toutes les anciennes tombes royales étaient conçues de la même façon. On plaçait en haut du tertre, côté Nord, une stèle votive, ou un petit temple de commémoration en l’honneur du défunt. Côté Sud, cachée, se situait l’entrée de l’hypogée. Mais tout avait été fait pour détourner l’attention de l’entrée du tombeau, afin de préserver le repos du défunt. Ici, la face Sud du mont préserve bien des curieux. La pente est rude. Cependant sur la photo que j’ai prise, on voit l’emprunte d’un petit chemin. Enfin, ce n’est que mon idée.

Une ancienne voie pavée traversant la lande, au loin, le sanctuaire  surplombe la vallée

Mais qui aurait pu être inhumé là, au cœur d’un mont, qui apparemment, à beaucoup d’importance pour les bretons. Certainement un grand roi. Le nouveau nom que l’on a donné au mont en témoigne: Saint Michel ! Étymologiquement, ce prénom signifie pareil que Dieu. Qui donc peut se targuer d’être l’égal de Dieu. Les missionnaires ont probablement voulu marquer le coup en baptisant ce mont d‘un si prestigieux titre, et effacé, peu à peu, dans les esprits, le nom originel de celui que l‘on vénérait ici.

En contre bas, à perte de vue, une lande secrète garde jalousement ses mystères

J’ai récupéré ma voiture, et je suis rentré chez moi. Je repensais à ma petite ballade. Déjà, je repensais à cet étrange petit verger, discret, protégé par ce petit muret de pierre blanche. Puis, à l’intérieur, cet étrange autel de schiste noir. Je repensais à ce sanctuaire de pierre, chaotique, perdu dans cette langue, protégé par ces tourbières. Je revoyais ce petit sentier, dans cette lande, qui semblait avoir été autrefois pavé, et qui était bordé de ce si rectiligne muret de pierre blanche. Enfin ! Je réentendais le chant de cet étrange oiseau, que je n’ai point vu, et qui me répondait Ankou à mon appel. Était-ce vraiment un oiseau ? Oui ! Qu’est-ce que cela pourrait-il être d’autre. J’ai l’impression d’être blasé de tout, plus rien ne m’ébranle, rien ne me surprend. Je pourrais croiser un E.T. sans que cela ne m’émeuve ni, ne me choc. Pauvre époque, pauvre de moi. La route qui me ramène chez moi prendra une demi-heure. Le soleil est maintenant présent. La météo ne s’était pas trompée.

Attention à ne pas se perdre, car ici, personne ne vous retrouvera, à part l'Ankou, peut-être

Saint Michel de Braspart : Photo Google vue du ciel

 

L'ankou

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